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Le tour de force des Slovènes sur le Tour de France - Le Monde

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Primoz Roglic lèves les bras, derrière, son compatriote Tadej Pogacar regarde son aîné célébrer sa victoire.

Il aura fallu attendre 2019, la 74e Vuelta et le 102e Giro, pour voir des cyclistes slovènes grimper sur leurs premiers podiums d’un Grand Tour. Le Tour de France, qui dispute sa 107e édition, ne devrait plus attendre des années avant de connaître le même sort. Nation longtemps mineure au sein du peloton, la Slovénie s’est trouvé un infernal tandem, bien parti pour terroriser ses adversaires.

Dans le coin gauche, Primoz Roglic (Jumbo-Visma), 30 ans, déjà une victoire sur un grand Tour (la Vuelta 2019) et immense favori de ce mois de septembre. Dans le coin droit, Tadej Pogacar (UAE Emirates), 21 printemps mais qui n’a rien d’un perdreau de l’année, puisqu’il compte déjà une troisième place lors du Tour d’Espagne remporté par son compatriote.

Mardi 1er septembre, à Orcières-Merlette, le duo a réalisé un doublé lors de la première arrivée au sommet de la Grande Boucle 2020. C’est le plus âgé qui a réglé le sprint d’une étape qui a plus ressemblé pour les cadors à un dernier kilomètre lancé qu’à une vraie première étape de montagne.

Lire aussi : Au jeu de cache-cache, c’est Primoz Roglic qui gagne

D’ordinaire économe en mots et méfiant vis-à-vis de la presse, Roglic n’a peut-être pas récupéré le maillot jaune dans la petite station des Hautes-Alpes - il est désormais 3e à 7 secondes de Julian Alaphilippe - mais il a déjà marqué son territoire.

« Gagner le jaune est l’objectif ultime à Paris. Il va falloir travailler à chaque étape, rester concentré et ne pas se blesser », a-t-il réagi sobrement une fois acquise sa seconde victoire d’étape sur le Tour, deux ans après celle obtenue à Laruns.

Drôle d’oiseau contre phénomène de précocité

Néotrentenaire, le leader de l’impressionnante équipe néerlandaise Jumbo-Visma n’a que sept ans de cyclisme dans les jambes. Avant d’intégrer une équipe continentale slovène en 2013, Adria Mobil, ce drôle d’oiseau s’envolait depuis les tremplins de saut à ski - il a été médaillé d’argent mondial junior par équipe en 2006. Pratique pour le gabarit, moins pour le sens tactique qu’il a dû développer lors de ses premières années de cyclisme.

Lire le portrait : Primoz Roglic, le grand saut

A l’inverse, Pogacar est un phénomène de précocité. L’an passé, sur le Tour de l’Algarve et le Tour de Californie, il est devenu le plus jeune coureur à remporter une course par étapes classée hors catégorie et une course par étape World Tour (première division du cyclisme).

L’histoire avait amusé le Landerneau : âgé de moins de 21 ans, la limite pour consommer de l’alcool aux Etats-Unis, il n’avait pas pu recevoir la bouteille de champagne promise au vainqueur mais, à la place, un ours en peluche.

Quelques coups de pédale plus tard, en septembre 2019, le prodige avalait trois étapes sur la Vuelta (3e coureur de l’histoire à réaliser pareil exploit avant ses 21 ans) et montait sur le podium, à 2 minutes 38 secondes de Roglic, le plus jeune à le faire depuis le Giro 1974.

Nation balkanique d’à peine deux millions d’habitants, la Slovénie était jusque-là plus renommée pour ses skieurs, basketteurs (champions d’Europe 2017) ou handballeurs (3es mondiaux en 2017).

« Nous sommes très forts dans pas mal de sports : saut à ski, basket, handball, volley ou football… En proportion de notre population, on pense même que l’on pratique trop de sports au haut niveau, explique Bogdan Fink, directeur sportif d’Adria Mobil, qui a fait débuter Roglic, En ce moment, le cyclisme devient très populaire. La pratique augmente. »

L’ombre de l’affaire Aderlass

Domen Novak, coureur slovène de l’équipe Bahrain-McLaren, a côtoyé Primoz Roglic au sein d’Adria Mobil, à ses débuts en 2014 et 2015 : « En général, nous, Slovènes, sommes des gens très travailleurs, disciplinés, qui aimons le sport et apprenons très vite. Je pense que ce sont les raisons de notre succès. »

Un chiffre jette une ombre sur la bonne santé du cyclisme slovène. Entre 2009 et 2019, selon un recensement du Monde, 8 des 19 coureurs slovènes ayant évolué dans le World Tour ont été suspendus pour dopage, parfois avant ou après leur passage dans l’élite du cyclisme. Soit 42 % d’entre eux, proportion énorme au regard de la faible efficacité de la lutte antidopage.

En mai 2019, Le Monde et le quotidien italien Corriere della Sera révélaient que le nom d’un ancien manageur d’équipe d’Adria Mobil, Milan Erzen, passé ensuite chez Bahrain-McLaren, apparaissait dans un réseau de dopage organisé depuis l’Autriche (opération « Aderlass »). Malgré une enquête, l’Union cycliste internationale n’a pas été en mesure d’ouvrir une procédure à son encontre.

Lire l’enquête : Dopage : la Slovénie au cœur de la tempête « Aderlass »

En revanche, l’UCI avait suspendu à titre provisoire le coureur Kristjan Koren et le directeur sportif, Borut Bozic, deux Slovènes membres de l’équipe Bahrain-McLaren (Bahrain-Merida à l’époque).

Rien n’indique que Roglic ou Pogacar soient impliqués dans l’affaire « Aderlass » mais le premier avait dû réagir lors du dernier Giro : « Pour moi, c’est difficile et tout simplement triste, car je crois maintenant que nous avons beaucoup de bons coureurs ; bien sûr, c’est triste pour le cyclisme slovène. »

« Les deux meilleurs au monde »

Malgré ces affaires de dopage, le cyclisme slovène ne s’est jamais aussi bien porté, en particulier grâce à ce duo doré. Membre de l’équipe Adria Mobil depuis 2012, le Croate Radoslav Rogina porte un regard admiratif sur ses voisins : « Ils ont la chance d’avoir ces deux talents, j’ose dire les deux meilleurs au monde ! » Un avis que partage Novak : « Primoz et Tadej sont deux des meilleurs cyclistes du monde. Je pense que notre avenir dans le cyclisme est très prometteur. »

En juin, les deux compères ont régné sur les championnats de Slovénie, transformant la course sur route et le contre-la-montre en une compétition ultra-relevée. La première a été remportée par Roglic devant Pogacar, la deuxième par le cadet devant l’aîné.

« Ils sont tous deux des stars en Slovénie. Aucun Slovène ne va rater le Tour cette année », raconte Bodgan Fink. Une concurrence sportive qui pourrait évoluer en rivalité exacerbée à la Anquetil-Poulidor ? « Ils sont amis et veulent juste faire du vélo. Il n’y a aucune jalousie et je ne pense pas que ça puisse arriver », tempère-t-il.

Impressionnant depuis la reprise de la saison, Primoz Roglic a remporté en août le Tour de l’Ain et était en tête du Critérium du Dauphiné, avant de renoncer à se présenter au départ de la dernière étape, victime d’une chute la veille. « Je me sens mieux chaque jour même si je ne suis pas encore au niveau que j’avais sur le Dauphiné », confie-t-il.

Plus mûr que Tadej Pogacar, épaulé par une armada construite pour gagner le Tour, Roglic s’affirme comme le favori des pronostics. A 30 ans, il a encore quelques années pour étoffer son palmarès tandis que l’avenir appartient sans doute à Pogacar.

« La question n’est pas de savoir si Primoz et Tadej peuvent gagner de grands tours mais plutôt combien vont-ils en gagner ? », assène le Croate Radoslav Rogina. Début de la réponse peut-être dès cette année sur le Tour.




September 02, 2020 at 11:38AM
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