Le départ du Tour de France 2020 a été repoussé à la fin août. Historique ! Pour mieux patienter, Jean-Louis Gazignaire tourne cet été quelques belles pages de la Grande Boucle.
Le 21 juin 1947 en sortant de la mairie où il vient d’épouser Raymonde, le petit Jean Robic dit à sa douce moitié : "Tu sais que je suis pauvre, mais attends juste trois semaines, je vais t’offrir un beau cadeau de noces… le Tour de France !". Raymonde est aux anges.
Mais elle est bien la seule à prendre ces propos au sérieux. Car la bataille s’annonce féroce pour ce premier Tour d’après guerre, qu’on attend depuis 7 ans. C’est déjà un miracle que le Président du conseil Paul Ramadier (l’inventeur plus tard de la "vignette" pour les autos), a réussi en fournissant voitures, motos, essence, hôtels, nourriture, vélos, etc en pleine pénurie dans cette France encore dévastée et toujours soumise aux tickets de rationnement. Mais la renaissance du Tour sera le grand événement de l’été, la fête retrouvée, le signe que la vie reprend enfin après les années noires.
Ce Tour 47 va connaître un succès populaire ahurissant ! Et ce petit bonhomme d’un mètre 59 et de moins de 60 kg prétend l’emporter ? Quelle prétention ! Pourtant il va le faire, ce sacré coureur obstiné jusque dans l’héroïsme, qui annonce chaque jour qu’il va gagner et qui agace ses adversaires. Les spectateurs et les lecteurs des journaux apprennent vite à le connaître, avec son drôle de casque à boudins qui le font rapidement surnommer "Tête-de-cuir", et puis sa manière hallucinante de descendre les cols pour compenser son poids plume (on dira qu’un jour il a rempli ses bidons de plomb pour peser plus lourd et aller plus vite) ce qui ne va pas sans provoquer de chutes nombreuses qui lui vaudront d’être aussi baptisé "Trompe-la-mort" … Il est couturé de partout ! Mais de tous ces surnoms, le public préférera toujours le tendre "Biquet".
En 1947, donc, sans complexe il gagne trois étapes, à Strasbourg et dans la montagne à Grenoble et à Pau. Mais ses qualités extraordinaires de grimpeur ne suffisent pas. Son petit gabarit est un handicap dans la terrible étape contre la montre entre Vannes et Saint-Brieuc qui s’étend sur la monstrueuse distance de 140 km… À deux jours de l’arrivée à Paris, il a perdu toutes ses chances, il est troisième au classement général à trois minutes du leader franco-italien Pierre Brambilla.
Arrive la dernière étape qui mène des coureurs de Rouen à Paris. Rien à voir avec le défilé d’aujourd’hui avec champagne et parade aux Champs-Elysées. À la sortie de Rouen, il faut gravir la côte de Bonsecours. Robic attaque. Brambilla revient. Fachleitner, 5e du classement général contre violemment, Brambilla s’affole et répond encore. Mais il a trop donné. Robic voit qu’il coince, lui a récupéré, il démarre et rejoint Fachleitner. Brambilla s’effondre, les fuyards creusent l’écart et 135 km après, Robic peut lever le bras au Parc des Princes : il va pouvoir offrir le bouquet du vainqueur à sa Raymonde.
Le Breton têtu entre dans la légende : jusque dans les années 1960 et 70, on entendra fuser partout au passage d’un cycliste le populaire "Vas-y Robic !". Le petit teigneux a déjoué tous les pronostics et devient le premier vainqueur du Tour qui n’aura pas porté le maillot jaune ! "La Brambille", en 1975, remontera la côte de Bonsecours à vélo avec Robic pour les besoins d’une émission de télévision de mon ami Daniel Pautrat. Il aura ce mot : "Mon cher Robic, vous fîtes ce que vous pûtes… et vous m’épatâtes !"
July 29, 2020 at 10:19AM
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Robic 1947 : "Trompe-la-mort" voulait offrir le Tour à sa femme ! - LePetitBleu
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